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Latifa POUYE: la passion de la peinture

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La capacité à recevoir une connaissance sans recourir à un raisonnement conscient s’appelle l’intuition. Le mot étant lâché, en lien avec l’univers des formes, des couleurs, représentations figuratives ou abstraites, nous voici en plein pieds dans le monde des Arts. Mesdames messieurs bonsoir et bienvenue sur Afrique Opinion, nous avons le plaisir de recevoir une invitée en visite en Suisse qui nous fait l’amitié de répondre à nos questions.

Madame, bonsoir et merci d’être des nôtres, nous allons ensemble échanger pour mieux vous connaitre. Vous pouvez-vous présenter à nos lectrices et lecteurs et nous parler de votre passion et autres ?

Bonsoir et merci de me recevoir, Je m’appelle Latifa Pouye, Artiste peintre autodidacte d’origine Sénégalaise, résidant à Dakar. J’ai réalisé mes toutes premières créations en 2003, ma peinture est intuitive parce qu’elle est avant tout un cri, disons un moyen d’expression. Etant autodidacte, je m’exprime assez souvent à travers mes œuvres pour dire les choses. Pourquoi la peinture intuitive, c’est par ce que pour la plupart de mes toiles, au fur et à mesure je vois des éléments, des formes apparaitre  et en travaillant les contrastes, la couleur et la profondeur, j’aperçois le traitement de la peinture et j’attribue un rôle à chaque forme dans le tableau.

Certes une autre dimension de pratiquer l’Art dans toute sa splendeur, et ça Madame Latifa je vous l’accorde. Alors dans cet univers artistique ou du moins dans ce corps de métier au Sénégal, y a-t-il  l’émergence des femmes ? Sachant tout de même que la peinture est votre passion et non votre métier ?

En effet, la peinture n’est pas mon métier mais plutôt une passion, les femmes sont très minoritaires dans ce domaine-là au Sénégal. L’on note approximativement 70% d’hommes dans la peinture et seulement 30% de femmes. Mais à ce jour il y a autant d’associations regroupant  des femmes artistes peintres au Sénégal, pas seulement juste Dakar mais dans toutes les régions du Sénégal. Donc nous essayons tant bien que mal de nous soutenir mutuellement, de travailler ardemment  et d’être plus fortes dans ce métier largement masculin.

Je comprends et suis d’avis qu’au-delà de votre passion, vous excellez dans une profession, c’est laquelle si ce n’est indiscret, je ne veux avoir l’air d’un inquisiteur.

Non Monsieur je vous en prie, vous n’avez rien d’un fouineur (Rires), alors effectivement je travaille depuis 20 ans dans l’aviation civile, particulièrement au sein du protocole diplomatique de l’ASECNA, l’Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar, regroupant 18 Etats membres.

Comme quoi l’on peut exercer bien entendu son métier et jouir pleinement de sa passion. Et bien Latifa, que ressentez-vous lorsque vous peignez ?

Alors quand je peins, il y a comme un échange inconscient et intuitif entre la toile et moi, je m’explique : Lorsque je peins des éléments sur une toile, chacun de ces éléments est en communion et laisse place à une œuvre finie, et une fois le geste terminé je pouvais en ce moment-là analyser l’œuvre et me rendre compte de ce que je voulais exprimer. Lorsque je prends par exemple une toile vierge, je n’ai jamais à l’idée de faire quelque chose de bien précis, j’ai en quelque sorte le sentiment de me laisser guider tout simplement par le pinceau, ne sachant quelles couleurs choisir au départ, chaque couleur s’impose d’elle-même à moi. Au final, j’observe  l’œuvre dans une contemplation inouïe, je l’analyse et c’est justement à ce moment-là que je réalise exactement ce que je voulais exprimer. C’est l’œuvre qui m’appelle, vous savez au départ, je ne décide jamais rien de précis, d’où la peinture intuitive, la mienne bien sûr.

La seule vraie chose est l’intuition, disait Albert Einstein ; alors cette force invisible qui vous guide et conduit votre pinceau inéluctablement à la réalisation des œuvres d’arts aussi belles les unes que les autres, devrait avoir sa source d’inspiration quelque part, la vôtre, parler nous-en.

Pour répondre à votre question, beaucoup d’artistes s’inspirent des choses qu’ils veulent communiquer ou représenter des messages. Pour ma part c’est quasiment différent, je m’inspire de tout ce qui m’entoure, du quotidien, de ce que je vois, des émotions que l’autre peut m’envoyer. En fait tout est sujet à une toile, une œuvre, la vie en elle-même est aussi sujette à une œuvre. Je découvre comme une sorte de renaissance au moment où je peints, disons que j’exprime ce que la vie nous donne qu’elle soit bonne ou mauvaise. Chaque sentiment peut exprimer une toile, une œuvre et même si les émotions négatives sont transcrites dans une toile, il y a immanquablement quelque chose de lumineux soit une couleur qui va te dire ,malgré l’obscurité , l’espoir est permis, accroches-toi à cette lueur parce que je ne veux surtout pas traduire ma peinture dans quelque chose d’obscure. Je veux toujours qu’il y ait une positivité que l’on affiche.

Vous savez, très souvent j’ai certains clients qui voient une œuvre et me disent : Latifa, il y a tellement de douleurs dans cette toile mais en même temps, il y a comme une lumière qui vient effacer cette noirceur comme si l’infirme partie de lumière pouvait gommer toutes ces obscurités de l’œuvre. Juste pour dire que malgré les difficultés que l’on peut vivre au quotidien ou dans la vie, il faut s’accrocher toujours  à la lumière  d’où des couleurs chaudes comme du jaune, du rouge ocre ou du jaune de sienne dans mes œuvres d’arts. Ce sont toujours des couleurs qui vont apporter de l’espoir dans un tableau très foncé, noir ou gris, parce que l’on est lumière et elle doit être représentée.

Vous reflétez singulièrement cette lumière dont vous évoquiez à l’instant. Eh bien Latifa, certes  vous n’aviez pas fait l’école des Beaux-Arts parce que vous êtes autodidacte. Comment en êtes-vous arrivée dans l’univers des Arts ?

Permettez-moi de vous raconter une anecdote, c’était en 2003, j’étais en congé de maternité, je ressentais le besoin pressant de faire quelque chose pour m’éviter l’inactivité. Ce congé de maternité a été une belle chose pour moi mais en même temps j’avais comme impression que cela m’enfermait dans un carcan et je ne pouvais pas faire grande chose. J’en ai décidé sur un coup de tête d’aller m’acheter de la peinture, des pinceaux, toiles et j’ai commencé à peindre. J’avais  continué dans cette dynamique durant tout mon congé de maternité et j’en avais peint une vingtaine d’œuvre, j’avais comme une boulimie de peindre, telle une volonté d’exprimer des choses. A un moment donné, je me suis demandé si c’est vraiment moi qui ai peint tous ces tableaux, affirmative c’est moi (Rires), j’avais beaucoup de choses à exprimer et c’est parti de là. Mais n’ayant aucun cursus dans l’art, je n’avais accordé beaucoup de crédit à cette vingtaine d’œuvres réalisées. Du coup j’ai fait appel  à des personnes extérieures  pour une sorte de validation, histoire de jauger mon travail si effectivement la magie est là ou du tout, du moins si réellement  j’avais cette fibre artistique ou un don.

Devinez quoi ? Ces vingtaines d’œuvres d’arts ont été toutes vendues ce jour-là. Mais étant donné que ce sont des personnes que je connaissais, je n’en avais pas tiré une grande satisfaction parce que je ne savais pas si c’était mon art qui est mis en avant ou de l’amitié qu’elles avaient pour moi.

Après je suis rentrée dans une sorte de remise en question et pendant une longue période donnée, je ne peignais plus ; mais l’envie a rapidement repris le dessus et c’est reparti de plus belle, j’ai repris la peinture jusqu’à ce jour. Cette volonté de peindre est inhérente chez moi, elle était profonde, je ne me suis plus jamais arrêtée, je peins énormément d’œuvre d’arts, j’ai commencé à faire des expositions pour avoir justement le ressenti cette fois-ci des personnes extérieures qui ne me connaissaient pas, et cela s’est bien confirmé. Mon travail est apprécié et c’est très valorisant pour moi de savoir que des gens qui ne me connaissent, pas jugent positivement mon travail et l’apprécient.

Aujourd’hui cette passion est dévorante, la peinture m’anime telle un second souffle, une volonté de vivre, de me battre. Sans la peinture, je me sentirais inexistante car elle fait partie intégrante de mon être.

 

 Je vous écoute avec passion puisque ce que vous décrivez transcende le temps et nous plonge totalement dans un univers exceptionnel avec un fond, de belles couleurs, des choses abstraites etc…

Quels sont les évènements auxquels vous aviez pris part dans le cadre de votre activité artistique ? La liste serait longue certes mais, juste un survol si possible, merci.

 

En 2010 j’ai participé à la 9è édition d’une exposition appelée : Dakar Woman Arts, organisée par un département de la Banque mondiale. Cette exposition se déroule tous les ans à Dakar, et de 2010 à 2018, j’y ai toujours pris part. Au-delà de cet évènement, j’en ai eu à faire des expositions privées pour des grandes fondations à Dakar telles que TOTAL, ELTON etc… J’ai aussi participé entre autres à des festivals des Arts et de Cultures dans la ville de St Louis au Sénégal, galeries et musée à Dakar ; j’en ai également exposé pour le collectif de femmes : le GIVE ONE, qui est un projet mis en place par un certain Thione Niang. J’ai exposé aussi à la Galerie Nationale qui est l’une des galeries les plus prestigieuses à Dakar. Dans le cadre de la biennale des Arts, j’ai exposé à IFAN (Institut Fondamental d’Afrique Noire) et jusqu’au aujourd’hui en 2022, j’ai fait la biennale des Arts à St Louis et exposé aussi à IABD toujours dans le cadre de la biennale qui a brassé pas mal de monde, ouvert par le Ministre du Transport Aérien.

 

Actuellement vous êtes en visite ici en Suisse dans le cadre de la promotion des Arts initiée par l’Association Ebène Suisse, que retiendrez-vous  des jours passés en terre Vaudoise ?

 

Tout d’abord j’ai eu le privilège d’être repérée par l’Association Ebène Suisse qui m’a fait l’honneur de m’y inviter pour voir comment nouer un partenariat avec différentes Galeries et Fondations et Institutions Suisses. Je voudrais remercier le président de Ebène Suisse pour cette initiative qui m’a permis de rencontrer non seulement des Fondations, Galeries mais aussi les Autorités. Ce séjour s’inscrit dans le cadre de l’intégration par la promotion des Arts et Cultures d’ici et d’ailleurs d’une part, et créer un partenariat avec des Institutions, Fondations ou Galeries. Je voudrais par ailleurs remercier les autorités de la commune de Bex qui m’ont reçue avec beaucoup de bienveillance et avec qui nous avions discutées de la possibilité d’organiser dans un avenir proche, des expositions d’arts, vernissages, des ateliers artistiques au cours desquels des populations étrangères et Suisses peuvent participer. Un évènement convivial entre l’artiste et les différentes communautés où l’on pourrait donner à chacune et à chacun les premières lignes directrices pour créer une œuvre d’art et moi je serai là pour les guider, les suivre, leur donner des conseils utiles. Je pense que ce partenariat serait intéressant pour une intégration et le vivre ensemble.

 

Madame Latifa Pouye, nous arrivons au terme de notre interview, auriez- vous un conseil à donner aux jeunes et des personnes qui vous liraient ?

 

Le temps passe tellement vite, ok bon (Rires), alors  pour des jeunes et toutes personnes  qui souhaiteraient embrasser  la peinture, c’est de vous dire qu’il n’y ait aucune barrière insurmontable et tout est possible à celle ou celui qui croit. J’ai commencé la peinture sans avoir aucune technique de base, ni académique puisque je suis autodidacte. Le tout est de croire en soi, même si vous faites quelque qui n’est pas aboutie, dites-vous qu’avec la pratique et le temps, votre pinceau va s’affiner, votre peinture va évoluer et c’est à force de travail sans complaisance  que la fleur va s’ouvir à vous tout simplement. Au début je ne croyais pas en moi car j’imaginais qu’il fallait impérativement sortir d’une école des Beaux-arts pour avoir les qualités requises pour peindre. Moi comme d’autres Artistes en Afrique ou à l´international, nous sommes la preuve vivante qu’il ne fallait pas indéniablement sortir des Académies des Beaux-arts pour parvenir à l’excellence; juste la volonté et la détermination.

 

Sourou Hazoume

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