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Société

Zoom sur Mahamadou Sognane

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Zoom sur Mahamadou Sognane, le responsable du bureau de l´intégration et de la naturalisation dans la ville de Martigny

« Je passais plus de temps avec les étudiants et mes collègues d´Université qu´avec ma famille et mes copains Sénégalais. Cela m´a aidé à comprendre beaucoup de choses, à vivre avec les gens d´ici, à les comprendre et à pouvoir faire mon cheminement »

Parti de son Sénégal natal, le jeune Mahamadou est aujourd´hui à la tête du bureau de l´intégration et de la naturalisation dans la ville de Martigny en Valais. Passionné de géologie et de gemmologie, ce quinquagénaire nous a ouvert ses portes dans un entretien qu´il a bien voulu nous accorder. Vivez ici avec nous le parcours exceptionnel de cet Octodurien qui prend bien soin aussi bien des Étrangers de sa commune que des Suisses.

Bonjour Monsieur Sognane et bienvenue sur Afrique Opinion. Pouvez-vous nous dire qui vous êtes ?

Merci beaucoup de me donner la parole. Je m´appelle Sognane Mahamadou, je suis Sénégalais d´origine et Valaisan-Suisse. Je me sens donc Martignerain plus particulièrement. J´ai 55 ans, je suis en couple et j´ai 4 enfants. J´habite à Martigny, je suis arrivé en Suisse pour les études en biologie et sciences naturelles. À la suite j´ai changé de filière pour me réorienter dans la géologie. Je suis donc Géologue de formation et je me suis spécialisé en Gemmologie. J´ai été formé en Suisse et en France (Nantes). Dans un premier temps j´ai travaillé pendant longtemps comme Géologue-Gemmologue, j´ai sillonné un peu l´Europe dans l´expertise des pierres précieuses, la vente et l´analyse aussi. En 2007 j´ai postulé à ce poste d´intégration qui venait d´être créé, et depuis cette année-là donc, j´œuvre pour l´intégration et la naturalisation dans la ville de Martigny.

Vous êtes aujourd´hui le responsable du bureau de l´intégration de la ville de Martigny et aussi vous avez une casquette de responsable de la naturalisation. Vous êtes issu de l´immigration car Sénégalais d´origine. Vous avez surement eu des mésaventures ou des difficultés tout au long de ce riche parcours à un moment donné. Comment vous vous en êtes sorti  et comment êtes-vous arrivé à venir vous installer en Valais après avoir fait vos études à Genève ?

Tout d´abord avec un peu de précision, je suis arrivé en Suisse à Genève. J´ai fait toutes mes études de Géologie à Genève. Étant toujours à Genève j´ai pu faire un Post-grade dans la Gemmologie en France à Nantes. Après cette formation je suis allé au Brésil faire de l´expertise de terrain dans le diamant, les pierres diamantifères et kimberlites, après je suis parti en Sierra-Leone dans cette même optique pour apprendre à traquer le diamant, à le trouver sans prendre de risques. Étant Africain, je me disais que c´était bien de me former dans un domaine où je serais utile pour l´Afrique.  Après cela, j´ai fait entre autres Madagascar etc. Je suis allé dans pas mal d´endroits dans l´optique de l´expertise géologique pour comprendre vraiment la géologie du diamant.

C´est sûr que quand on quitte son pays, son continent et qu´on arrive ici en Europe, il y a des choses qui sont plus ou moins différentes. La seule chose qu´on a, nous en tant qu´Africain c´est de pouvoir quand-même avoir ce lien avec des gens, de pouvoir vivre avec les gens parce qu´on a cette ouverture d´esprit. Là je parle du Sénégal que je connais et je sais que cette ouverture d´esprit est aussi un peu partout ailleurs en Afrique. Mais tout changement d´environnement n´est pas facile. C´est vrai que j´ai eu des difficultés mais ma chance a été que, quand on est dans une petite section comme les sciences de la terre à l´université, ma première famille était les étudiants. J´ai donc vraiment vécu des choses extraordinaires à Genève. Je passais plus de temps avec les étudiants et mes collègues d´Université qu´avec ma famille et mes copains Sénégalais. Cela m´a aidé à comprendre beaucoup de choses, à vivre avec les gens d´ici, à les comprendre et à pouvoir faire mon cheminement. Personnellement j´ai eu moins de soucis par rapport à d´autres étudiants étrangers que je connaissais, pas seulement des Sénégalais, mais d´autres étrangers aussi. C´est vrai que mes premiers soucis étaient d´abord l´acceptation de l´autre, mais on arrivait quand-même à nous en sortir au-delà de tout cela. Moi en tant qu´amoureux de la nature, des sciences naturelles, de géologie gemmologie, j´étais complétement amoureux des alpes valaisannes. C´était donc étonnant d´abandonner mes amis étudiants Sénégalais ou autres, ils me demandaient comment je pouvais quitter Genève, grande ville multiculturelle, ville internationale pour aller m´installer dans une petite ville comme Martigny au cœur des alpes où les gens ont un esprit de montagnard. Cet amour de la nature et de l´environnement a changé toute ma vie.

Est-ce que vous pouvez nous parler d´une journée de travail et de vos rapports avec vos collègues

Vous savez l´intégration c´est quelque chose de fantastique. J´ai été étranger, j´ai été accueilli, j´ai fait mon intégration et aujourd´hui moi de mon côté je fais mon travail dans le but d´accueillir les étrangers, de pouvoir les informer, les orienter, les accompagner, c´est quelque chose de formidable. Alors c´est vrai que c´est un travail enrichissant et qui me donne énormément de satisfaction. Maintenant pour le bureau, on a une dizaine de projets qui fonctionne donc j´ai développée par mes soins et qui ont beaucoup de succès. Mais une journée de travail naturelle, c´est un bureau qui est ouvert à tout le monde, les gens arrivent, ils peuvent poser toute sorte de question que ce soit des étrangers ou même des Suisses qui ont des contacts avec les étrangers, comme des conjoints ou conjointes venant d´ailleurs; le bureau essaye de répondre et de les orienter vers des services spécifiques de la commune. Il y a une collaboration multi-institutionnelle, le bureau de l´intégration collabore avec les services communaux en matière de migration. Il y a aussi les partenaires associatifs, il y a une quinzaine de partenaires associatifs de la ville qui œuvrent pour l´accompagnement des personnes qui sont issues des communautés étrangères.  Ces associations sont des piliers importants de l´intégration.

Vous êtes un amoureux de la nature, je vais du fait que c´est un de vos hobbies, sinon quels autres activités extra-professionnelles faites-vous ?

En dehors de mon travail, personnellement je suis assez sportif, je fais un peu de la marche à la montagne, j´aime bien courir, je ne fais pas de sport d´hiver que j´ai quand-même essayé. Par contre j´aime bien allé fouiller, chercher des minéraux dans la nature comme au Mont-Chemin ou dans les Grisons par exemple. Je suis passionné de gemmologie au quotidien, j´ai tout un laboratoire, j´essaye quand-même à la maison de faire quelques petites analyses et d´apprécier toute cette collection de pierres précieuses que j´aie. Je consacre aussi quand-même une partie de mon temps à ma famille.

On va parler aussi du phénomène migratoire qui sévit actuellement dans le monde avec des jeunes Africains qui risquent leur vie en traversant la mer méditerranée pour venir demander l´asile en Europe. Que leur dites-vous ?

Ce phénomène migratoire est vraiment triste. L´Afrique a assez de ressources, je ne veux pas faire de la politique mais c´est dommage que ces ressources sont mal gérées. Je pense que l´idéal serait de faire un voyage officiel, un voyage de formation, d´étude mais s´aventurier dans des voies comme celles-là, que ce soit par la mer, dans des bateaux par transits avec des passeurs, je pense que c´est vraiment dommage. Vous savez, on voit juste une partie de l´immigration, je parle de quitter son pays et de partir, je ne parle pas de pays en guerre car c´est autre chose; quand il y a la guerre, des calamités ou autres choses, là on n´a pas de choix. Mais de choisir délibérément de partir parce qu´on veut venir en Europe, la plus grande difficulté serait de trouver sa place en Europe. Moi par exemple je m´occupe des personnes qui sont officiellement en Suisse avec un permis ou avec un contrat de travail et je vois tous les jours qu´il y a énormément de personnes qui arrivent et qui n´ont pas encore de travail et sont Européens et veulent s´intégrer, trouver du travail et apprendre la langue, valider leurs diplômes pour pouvoir trouver du travail. Alors quelqu´un qui quitte l´Afrique, qui n´a pas fini sa formation, là je parle de la jeunesse, on a besoin d´elle en Afrique. Il faudrait quand-même que nos dirigeants pensent à cette jeunesse-là. Au-delà de cela, l´Afrique a la plus grande richesse du monde en termes de ressources minières. Tous les minéraux qui se trouvent sur le tableau périodique  des éléments de Mendeleïev se trouvent au Congo RDC (République Démocratique du Congo, ndlr), c´est impressionnant. Ceci représente plus que le budget de fonctionnement des États-Unis en termes de richesse. Ça ce n´est que la richesse qui a été identifiée, on ne sait pas le reste. C´est dommage qu´avec cette richesse-là, les états ne puissent contrôler ne serait-ce qu´une partie et redistribuer à leur population et surtout investir dans l´éducation et la santé. Ceci est capital.

Merci beaucoup Mr Sognane de cet entretien à cœur ouvert et du temps accordé à notre magazine.

Merci aussi de cet entretien, ça m´a fait plaisir.

Propos recueillis par Merlin Tchouanga

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